L’Open Data en Afrique

 

Du 1er au 3 Juin 2017 a eu lieu la première conférence d’Afrique francophone sur les Données Ouvertes et sur le gouvernement ouvert, qui a rassemblé 22 représentants de pays africains, ce qui montre l’intérêt croissant des Etats du continents pour l’Open Data. Ces dernières années sont sans aucun doute celles de l’Open Data et de l’African Data Revolution, terme qui désigne le profond changement dans la façon dont les données sont utilisées et mises en valeur sur le continent pour impacter le Développement et la prise de décision.

 

Mais qu’est-ce que l’Open Data ? Quels en sont les enjeux principaux en Afrique ?

Zoom sur : Open Data for Africa

La Banque Africaine de Développement a lancé en 2012 une plateforme d’Open Data nommée “Open Data For Africa”. Celle-ci a pour objectif de rendre publique des données sur les 54 Etats que compte le continent. Les utilisateurs de la plateforme pourront ainsi accéder à une grande variété d’informations et de données, fiables et actualisées. Pour la BAD, cette initiative « permettra de hisser le continent à l’avant-poste de l’information sur l’économie mondiale ».

 

Qu’est-ce que l’Open Data ?

L’Open Data ou « ouverture des données » est  une philosophie d’accès à l’information et une pratique de publication de données librement accessibles et exploitables par tous. Il s’agit donc de mettre à disposition de tous des données ouvertes sur l’économie, les transports, la démographie, les dépenses publiques, les statistiques, le numérique, l’environnement etc…

Apparues sur le terrain médiatico-politique dans les années 2010, les initiatives d’Open Data se multiplient en Afrique. Cependant leur nombre demeure faible, entre limites techniques et restrictions politiques.

 

Quels usages pour l’Open Data?

L’Open Data est loin d’être un sujet secondaire, qui ne concerne que les geeks ou les spécialistes. Ses applications sont aussi nombreuses et variées qu’indispensables et pertinentes face aux grands défis de notre époque.

Tout d’abord, l’ouverture des données engendre un “bouillonnement créateur” indéniable : applications mobiles conçues pour résoudre les problèmes de congestion urbaine, carte interactive des centres de santé ou compteur de consommation énergétique en temps réel, de tels dispositifs s’appuient sur des données produites puis ouvertes à tous. La Data devient un matériau brut à récupérer, transformer et valoriser.

Cartographie du réseau  de transports kenyan grâce à Digital Matatus

S’appuyant sur le processus de crowdsourcing, Healthsites veut répertorier les centres de santé du monde entier.

 

Pour l’Afrique, l’Open Data semble être un facteur important de développement. Car qui dit données ouvertes et disponibles dit création de richesse, de services, d’applis et de start up, mais aussi meilleure gestion des services urbains (accès à l’eau, transport, sécurité, santé, gestion des déchets, gestion du trafic en temps réel). Ainsi qu’une plus grande transparence, lutte contre la corruption et responsabilisation des collectivités locales par la consultation et l’implication des citoyens dans les affaires publiques.

Une révolution encore balbutiante mais pleine de promesses

Alors que le Kenya, le Maroc, le Rwanda ou le Burkina Faso à l’Ouest font figure de pionniers de l’Open Data, nombreux sont les progrès à faire sur l’ensemble du Continent. La tendance à l’ouverture des données publiques reste encore trop inégale, freinée par des problèmes tant d’infrastructures et de moyens que de politiques publiques. On note de très nombreuses initiatives émanant de la société civile, un peu moins des gouvernements, par manque de moyens ou frilosité.

Zoom sur : The Open Data Barometer

The Open Data Barometer mesure (et promeut) l’ouverture et la diffusion des données dans chaque pays. Chaque année, l’organisme publie un rapport qui classe les pays selon la qualité de leur Open Data (ouverture, disponibilité, exhaustivité, législation) et tire des conclusions en vue d’une amélioration générale et une meilleure diffusion des données. On peut considérer l’Open Data Barometer comme un des acteurs les plus influents du secteur de la Data.En 2017, le rapport ODB indiquait ces points principaux :1) Au niveau mondial, les données des Etats restent encore incomplètes et de mauvaise qualité2) Une importante volonté politique est indispensable au développement de l’Open Data3) On constate que les gouvernements ne publient pas encore les données nécessaires pour “reconquérir la confiance des citoyens” (budgets et dépenses publiques par exemple)4) l’Open Data génère des recettes économiques, mais les projets ne se concentrent pas encore assez sur l’inclusion et l’équité (les groupes les plus pauvres sont encore les plus exclus de l’accès à la Data)Pour le continent africain, l’ODB dresse le bilan suivant : la note générale du continent reste assez faible (14/100 pour l’Afrique sub saharienne, contre 46/100 pour l’Asie de l’Est par exemple), les gouvernements restent encore trop dépendants de tiers pour établir leur Open Data (ONG, bailleurs de fonds etc.), et très peu de jeux de données sont totalement ouverts. On note cependant que le Maroc, le Kenya, l’Afrique du Sud et le Sénégal font figure de leaders dans le milieu de l’Open Data africaine.

L’Open Data a le potentiel pour bouleverser les modes de gouvernance et modèles économiques africains.Des données honnêtes, disponibles, lisibles, même si elles montrent parfois une réalité difficile, sont toujours meilleures que l’absence de données car la transparence et l’inclusion des citoyens dans la vie de leur pays sont des piliers pour un développement harmonieux. De plus l’Open Data représente des perspectives économiques non négligeables.Enfin, rendre les données ouvertes n’est que le premier pas. Il faut ensuite s’assurer que la population ait accès aux connaissances et aux infrastructures pour y accéder. L’accès limité à internet, l’électricité inégale, les barrières de langues et autres facteurs d’exclusions sont autant de barrières au développement de l’Open Data.Cependant l’ouverture des données est un processus itératif qui intéresse de plus en plus d’Etats africains. Nous encourageons cette ouverture comme un des piliers de la croissance et de l’autonomisation des pays du continent.